Diversité culturelle. Le socle inattendu de l’unité nationale
Une particularité que lui envient beaucoup de pays et de peuples alentour. La particularité de reposer sur plusieurs centaines de micro sociétés ayant plus ou moins chacune ses réalités culturelles et religieuses, ses caractéristiques alimentaires et vestimentaires, ou encore d’autres pratiques traditionnelles bien ciselées, l’imposant comme entité sociale différente des autres. Des différences qui rapprochent paradoxalement au lieu d’éloigner, et sur lesquelles le Cameroun s’est bâti une nation résiliente, forte, solide et ambitieuse, parée pour défendre et élever la même terre.
De manière savante, les experts nationaux et internationaux spécialisés sur les questions de géo-anthropologie ont étalé le Cameroun culturel sur quatre grandes aires culturelles. Du Nord au Sud, l’on aura donc respectivement l’aire culturelle Soudano-sahélien qui abrite tout le Septentrion un peu de l’Est et fait une ouverture sur le Sahel, l’Afrique de l’Ouest, du Nord voire de l’Est ; l’aire culturelle de la Forêt qui porte tout le Grand Sud et l’Est du Cameroun, avec toute la société bantou et surtout le peuple fort Ekang et les Fang-Béti qui vivent aussi bien au Cameroun qu’en Guinée Equatoriale, au Gabon, au Congo ou encore en Angola ; les Grass Fields des Hauts plateaux de l’Ouest et du Nord-Ouest du Cameroun ; et l’aire culturelle Sawa pour les peuples du Grand Littoral avec une ouverture sur les peuples du Congo voire d’Afrique australe. Plus de 250 langues maternelles nationales dont aucune placée au-dessus des autres, comme autant de traits d’un trésor qui préfèrent s’entremêler avec harmonie. Ainsi, à côté des canaux de socialisation traditionnels, l’Etat du Cameroun a décidé de s’investir dans la préservation et la transmission du patrimoine culturel national à travers les programmes officiels des ministères en charge de l’éducation, des arts et de la culture.
Une volonté politique pour valoriser l’âme d’une nation, ce qu’il y a de meilleur pour un peuple, dans un devoir de mémoire prononcé et le souci du bien-être pour les générations futures. Toute une commission nationale chargée du multiculturalisme a même récemment vu le jour. Pour régir la vie culturelle, cultuelle et religieuse, politique et économique, des centaines de chefs traditionnels pour autant de royaumes, et qui trônent sur un système assez hiérarchisé allant du pouvoir central aux classes sociales les plus basses. Véritables garants de la sécurité de ce trésor ancestral, ces précieux relais ont désormais la reconnaissance des pouvoirs publics pour qui chaque chef traditionnel devient le dépositaire de ces précieuses valeurs, une pièce essentielle d’un tableau fortement irisé, à conserver absolument et à tous les moyens.
Stéphane Aleokol