Politique. Surprenantes déclarations de l’Ambassadeur des États-Unis d’Amérique sur la situation sécuritaire au Cameroun et l’avenir du pays
Au sortir d’un entretien avec le président Paul Biya ce vendredi 18 juillet, S.E. Peter Henry Barlerin a fait publier un communiqué dans lequel il a fait part de la teneur de ses échanges avec le chef de l’État.
Au-delà des convenances diplomatiques dont la transmission des vœux du président Donald Trump à son homologue camerounais à l’occasion de la Fête nationale du Cameroun, l’ambassadeur américain a cru bon de sortir de son rôle pour donner des leçons à la nation camerounaise et à son chef.
Sur la crise sécuritaire dans les régions du Sud-Ouest et du Nord-Ouest, il affirme ainsi avoir « discuté avec le Président de notre point de vue [américain] selon lequel les deux parties au conflit ne s’écoutent tout simplement pas. » et de prétendre ensuite que « du côté du gouvernement, il y a eu des assassinats ciblés, des détentions sans accès à un soutien juridique, à la famille ou à la Croix-Rouge, et des incendies et des pillages de villages. Du côté des séparatistes, il y a eu des meurtres de gendarmes, des enlèvements de fonctionnaires et des incendies d’écoles. Les gens des deux côtés du conflit se sont engagés dans un discours qui déshumanise le côté opposé. » À ce sujet, l’ambassadeur des États-Unis sait très bien que l’on ne négocie pas avec des terroristes. La horde d’individus qui sévissent actuellement contre les institutions camerounaises sont en mission de déstabilisation afin de partitionner le Cameroun. Ils doivent être mis hors d’état de nuire.
D’autre part, sur sa lancée, M. Barlerin dit avoir « suggéré au président Biya qu’il devrait penser à son héritage et à la façon dont il veut se souvenir dans les livres d’histoire pour être lus par les générations à venir, et proposé que George Washington et Nelson Mandela soient d’excellents modèles [pour le président de la République du Cameroun]. »
La publication de ce communiqué lui a valu une réplique cinglante des autorités camerounaises à travers le porte-parole du gouvernement, M. Issa Tchiroma. Ce dernier, à juste titre, a répliqué en rappelant au représentant des États-Unis que « le peuple camerounais est souverain et que le président Biya entrera « dans l’Histoire par la grande porte ». « C’est un homme d’honneur. Soucieux, naturellement, de la lecture qu’on fera de lui, une fois qu’il aura organisé sa succession le moment venu. Moi, je suis persuadé qu’il entrera dans l’histoire par la grande porte, parce qu’il est conscient de sa responsabilité. Il ne s’écoule pas une seconde sans qu’il ne pense à l’avenir de notre Nation », d’assurer M. Tchiroma.
Il faut dire que l’élégance de M. Tchiroma tranche avec l’incompréhensible indélicatesse de l’ambassadeur américain qui a affiché, dans son communiqué, une certaine arrogance face à un pays souverain auquel il revient de décider de l’avenir et du choix de ses dirigeants. Une attitude d’un autre temps courante dans les Républiques bananières dont le Cameroun ne fait pas partie. On ne peut pas, en même temps, se féliciter de la marche des affaires d’un pays, de sa bonne entente avec les États-Unis dans le domaine des affaires, de la santé ou encore de la sécurité et proposer à celui qui conduit la destinée de ce pays, de songer à quitter le pouvoir.
Le Cameroun, c’est le Cameroun et toute l’expérience accumulée par Paul Biya n’attendra pas les conseils d’un ambassadeur, fût-il des États-Unis d’Amérique, pour se mettre au service des Camerounais et à leur avenir. Peter Henry Barlerin aura manifestement manqué l’occasion de mieux évaluer ses propos, qui sont loin d’être diplomatiques. Sur le front des relations internationales, on a déjà vu, lu et entendu de plus intelligent.